Des grilles, des sas, des portes, des clefs qui tournent. Le quotidien des détenus du centre pénitentiaire de Metz-Queuleu. Un univers peu ordinaire pour le groupe d’une cinquantaine de patrons venus visiter les ateliers de la prison, où ils peuvent sous-traiter une partie de leur production.
Dans l’atelier de 3 000 m2, entre 60 et 120 détenus viennent travailler chaque matin. Pas l’impression d’être en prison, plutôt dans une entreprise ordinaire avec ses chaînes d’ouvriers et ses conteneurs en attente. Les entreprises sous-traitent ici la réalisation de tâches répétitives : petites bougies d’ambiance à faire mouler, vis et boulons à mettre en sachet…
Attablé à son plan de travail, Michel (le prénom a été modifié) soude des attaches de pare-soleil pour une marque de voitures de luxe qui ne souhaite pas faire connaître son nom. Il en fabrique 600 chaque jour. A raison de 2 centimes la pièce, « ça fait 12 euros par jour ». Michel est là depuis cinq ans. Il en a pris quatorze pour « une affaire de mœurs ». Le reste de ses journées il le passe dans sa cellule, à écouter la radio. « Je me lève à cinq heures, et je commence vers 7h20. Puis je m’arrête à 16h. Tout tourne autour du travail. Y a pas à se plaindre, ça nous occupe. On n’est pas à l’hôtel. On a fait une connerie, il faut qu’on l’assume. »
Système D
L’atelier est un petit monde organisé, avec sa hiérarchie, ses rôles précis. Le plus haut gradé est chargé d’inventer des techniques, souvent avec les moyens du bord. Comme cette pique en bois, pour enchâsser de la mousse dans de petits tubes : « Ce sont des joints antibruits pour le réseau ferré algérien. » 25 000 joints sont fabriqués chaque jour par huit détenus. Une cadence qui intéresse les entrepreneurs. « On a une commande très spécifique sur de la tuyauterie. Je travaille déjà avec un CAT, pourquoi ne pas essayer ici ? » s’interroge une responsable de l’entreprise Montec.
Autre avantage économique, la proximité : « pas besoin d’aller en Chine, ça fait autant de frais de transport en moins » ajoute Olivier Agostini de la société Siges en charge de l’organisation du travail. Mais ce n’est pas tout. Pour le détenu, « le travail est le premier élément intégrateur dans la société. C’est un outil de lutte contre la récidive. C’est aussi obtenir une rémunération pour l’indemnisation des victimes et des parties civiles, se procurer des biens de consommation à la cantine comme des cigarettes, de la lecture, de la nourriture… » continue Marc Baader.
Un peu de dignité
Cet article est paru le 3 décembre 2009 dans l’hebdomadaire La Semaine n° 246. Pour lire le journal dès sa parution, abonnez-vous !