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Moselle-Nord. Frontaliers : le Luxembourg, voisin pas si serein que cela
Fluidifier le dialogue avec le Luxembourg, penser ensemble le territoire de demain… Ces enjeux occupent les esprits d’un côté comme de l’autre de la frontière. Une conférence « Effets frontières » organisée par la communauté de communes de Cattenom et environs (CCCE) au golf de Preisch, jeudi 18 avril, a donné aux élus mosellans l’opportunité de les aborder et de mieux appréhender la situation économique au Luxembourg.
Une situation qui n’aspire pas à la confiance du côté des chefs d’entreprise. « 28 % [d’entre eux] sont plutôt pessimistes sur l’activité pour les six prochains mois et 53 % estiment qu’elle va stagner. En termes d’emploi, nous sommes plutôt sur des perspectives de stabilité. Quand sur l’investissement, ils sont très peu nombreux à penser qu’ils vont investir davantage dans les prochains mois. Le sujet de la rentabilité est lui aussi inquiétant puisque 34 % estiment qu’elle va baisser » reprend Anthony Villeneuve, précisant que cela résulte de la crise inflationniste. En effet au Luxembourg, quand les prix augmentent de 2,5 %, tous les salaires augmentent de 2,5 % également. « Il y a eu cinq tranches d’indexation en 24 mois, ce qui a très largement alourdi les coûts salariaux des entreprises et a pu mettre en difficulté celles qui sont en compétition internationale. Ainsi 64 % des chefs d’entreprise considèrent que le coût de la main-d’œuvre est une préoccupation majeure aujourd’hui. » À ces éléments s’ajoute l’incertitude qui plane autour des prochaines élections européennes.
Afin d’assurer la pérennité de son économie, le Grand-Duché se doit d’engager des réformes structurelles importantes pour « stimuler la production, restaurer la rentabilité, attirer les talents, maîtriser le coût du travail, simplifier les démarches administratives, restaurer l’attractivité fiscale, réformer le système de pension », énumère Anthony Villeneuve. Des mesures qui doivent permettre de réussir le pari de la « double transition numérique et environnementale ». Car c’est elle qui va conditionner l’avenir de l’économie luxembourgeoise et la prospérité du pays, et par extension celle de nos territoires.
Face à une « interdépendance territoriale grandissante » entre le Luxembourg et ses voisins, il est nécessaire d’entrevoir les évolutions majeures qui pourraient « mettre au défi le modèle transfrontalier à l’avenir ». Vincent Hein de la fondation Idea — un laboratoire d’idées créé par la chambre de commerce, il y a dix ans — en note plusieurs. Sur le marché de l’emploi, la concurrence territoriale est déjà là mais elle risque de « s’exacerber encore car la démographie n’est plus ce qu’elle était », indique-t-il. Il s’arrête un instant sur les disparités fortes entre les régions et l’ultra-spécialisation des territoires avec « Le Luxembourg comme territoire employeurs et les territoires autour qui s’enfonce dans l’économie résidentielle ». Le manque de logement au Luxembourg est un autre facteur important qui va « continuer d’engendrer des pressions et d’augmenter les prix sur le territoire frontalier, rendant l’accès au logement de plus en plus compliqué. » Il y a aussi le risque d’un retour aux frontières dans le débat public. « C’est quelque chose de réel. Si nous étions amenés à avoir une nouvelle logique de fragmentation au niveau de l’Union européenne décidée par des États membres, elle pourrait atteindre la fonction vitale de ce territoire qui s’est construit sur les flux transfrontaliers. »
Le bon interlocuteur
Connaître les risques, c’est aussi se donner les moyens d’avancer et de les affronter ensemble. Comment ? « Il faut changer notre manière de faire de la coopération transfrontalière. Ne plus être dans une logique de co-développement et aller plus loin que le financement des voies de chemin de fer et des parkings relais », indique la fondation Idea, forçant volontairement le trait. Il est vrai que jusqu’ici les discussions sont centrées sur la mobilité. Et si « c’est nécessaire, ce n’est pas suffisant », relève Vincent Hein. Lui propose une stratégie commune pour penser le territoire transfrontalier qu’il compare à une métropole dans sa globalité. « La politique de coopération transfrontalière pourrait s’orienter vers la construction d’un projet pour ce territoire. Il faut que l’on ait des objectifs comme ça se fait ailleurs dans le Grand-Genève, le Grand-Paris. Il n’y a pas de frontières mais des projets de développement, de spécialisation, de localisation de société dans d’autres zones. Je ne vois pas une seule politique à mettre en œuvre qui puisse être portée seule par le Luxembourg. »
« Comment établit-on le dialogue avec le Luxembourg ? », interroge une élue de la collectivité qui regrette que le Luxembourg n’échange bien souvent que d’État à État, lors de la conférence intergouvernementale notamment. Vincent Hein admet qu’il y a aussi des efforts à faire côté luxembourgeois pour favoriser « une diplomatie de proximité ». Et prend l’exemple du Pôle métropolitain frontalier (PMF) qui pourrait constituer un porte-parole pour le territoire. Ce qui ne manque pas de faire réagir Michel Paquet qui n’a jamais caché le peu d’intérêt que constitue pour lui, le PMF. « Il faudrait qu’il s’adresse à ceux qui ont des compétences. Le PMF n’en a aucune. Cela pourrait être le ban communal ou intercommunal ? »
Vincent Hein émet quelques réserves. « Je ne pense pas qu’il soit possible de dialoguer avec tous les EPCI pour le Luxembourg. Pour que ça fonctionne, il faut certes qu’il envoie des signaux mais aussi qu’il y ait une entente de ce côté du territoire. » Et Roland Balcerzak, élu de la collectivité de clore les débats. « À 10 ans, une gouvernance sur un bassin de vie transfrontalier existera. À nous de nous structurer et d’apporter dans le débat les éléments fondamentaux qui concernent la mobilité, la fiscalité, la santé, la formation, l’environnement. C’est un changement complet pour les vingt prochaines années. À nous de nous mettre en route, de bien nous placer dans les débats et de prendre aussi ce leadership chacun à notre place. »