Deprecated: mb_convert_encoding(): Handling HTML entities via mbstring is deprecated; use htmlspecialchars, htmlentities, or mb_encode_numericentity/mb_decode_numericentity instead in /var/www/lasemaine/wp-content/themes/la-semaine/App/Actions/Ads/InContent.php on line 68 Lorraine. Fin de vie : un cadre réglementaire se met en place - La Semaine
Lorraine. Fin de vie : un cadre réglementaire se met en place
Le projet de loi sur « l’accompagnement des malades et la fin de vie » a été adopté le 17 mai, par les députés de la commission spéciale qui ont apporté différents changements au texte initial, y compris sur des points « sensibles » comme l’aide à mourir. Dès le 27 mai, les débats reprennent à l’Assemblée nationale. La Semaine consacre un dossier à cette importante question de société.
Ces « 46 heures de débats », pour reprendre les mots du député vosgien Renaissance David Valence qui faisait partie de la commission spéciale (tout comme deux autres Lorrains : Caroline Fiat, députée LFI de Meurthe-et-Moselle qui est co-rapporteur du projet de loi et Thibault Bazin, député LR de Meurthe-et-Moselle) s’inscrivent dans une « réflexion » qui n’est pas nouvelle, le sujet faisait partie des promesses de campagne du candidat Macron et un groupe de travail transpartisan a planché sur le dossier en 2023 avec le texte d’une convention citoyenne (préconisations) comme support. Il a pris de la « substance » en mars dernier lorsque Emmanuel Macron a (enfin) présenté les grandes lignes de son projet de loi pour une « aide à mourir », suite à de multiples consultations. Une annonce qui s’est accompagnée, bien évidemment, de réactions en sachant que le texte ne pourra jamais faire l’unanimité, ne serait-ce que pour des questions éthiques, morales, intimes, religieuses…
Le 14 mars, un collectif d’associations de soignants exerçant auprès des personnes en fin de vie, parmi lesquelles la Société française d’accompagnement et de soins palliatifs (Sfap), la Société Française de Gériatrie et Gérontologie (SFGG) ou bien encore l’Association Nationale des Médecins Coordonnateurs et du Secteur Médico-social (MCOOR), dénonçait un manque de considération ou d’ambition en matière de soins palliatifs alors qu’ils auraient dû être au cœur du projet. « Supprimer les malades pour supprimer le problème à moindre coût, voilà ce qu’en somme propose cette annonce », écrivait le collectif. Tout en insistant, elle aussi, sur la nécessaire « généralisation de l’organisation des soins palliatifs », l’Académie nationale de chirurgie se déclarait favorable, sur le principe, à l’évolution de la prise en charge de la fin de vie (dans certaines conditions). D’autres organisations se montraient plus enthousiastes à l’image de l’Association pour le droit de mourir dans la dignité (ADMD) qui « milite pour que chaque Française et chaque Français puissent choisir les conditions de sa propre fin de vie ».
Des réactions, il y en a également eu de la part des instances religieuses. Différents membres de la CEF (Confédération des Évêques de France) sont notamment montés au créneau pour critiquer le « projet » et insister pour que l’on appelle un « chat », un « chat ». Dans une interview accordée à France Inter, le 12 mars dernier, Mgr Vincent Jordy, archevêque de Tours, vice-président de la CEF avançait que ce projet de loi c’était « l’euthanasie ET le suicide assisté » (et non pas l’un ou l’autre) quand bien même le président de la République veillait à employer des mots « valises un peu doux ». Et lui aussi d’insister sur l’importance des soins palliatifs passés au second plan. De son côté, le recteur de la Grande mosquée de Paris, Chems-Eddine Hafiz, se déclarait « très inquiet », regrettant lui aussi l’ambiguïté liée au choix des mots. « On n’a pas besoin d’une nouvelle loi », avançait alors Haïm Korsia, le Grand Rabbin de France, pour qui la ligne de l’euthanasie comme celle du suicide assisté n’étaient pas franchies.
« On empêche les malades de souffrir, le but n’est pas de tuer », précisait-il dans une interview accordée au Point qu’il a relayé sur ses réseaux sociaux. En ce qui concerne les politiques, l’annonce présidentielle ne s’était pas accompagnée d’une bronca de circonstances. Au sein même des partis, des nuances se sont manifestées, compte tenu des convictions que chacun peut avoir sur le sujet. Cela dit, avec l’approche des élections européennes, le contexte n’est pas forcément propice à trop s’épandre pour qui n’est pas en phase avec « la ligne ». Et puis force est de constater que les Français sont majoritairement favorables à ce que la loi évolue en ce qui concerne la fin de vie et sa prise en charge.
La « société » attend des réponses
Selon un sondage IFOP Fiducial pour Sud Radio, 82 % des interrogés disent approuver le projet de loi évoqué par le chef de l’État, rapportait le média mi-mars. Un chiffre qui oscille entre 75 % pour les membres de La France Insoumise – 79 % pour le RN – à 95 % pour les Écologistes. Seuls 9 % des Français « n’approuvent pas du tout » ces propositions. Mi-mai 2024, l’IFOP pour l’Association pour le Droit de Mourir dans la Dignité (ADMD), cette fois, a réalisé une étude portant sur le regard des Français sur la fin de vie (échantillon de 2 527 personnes, représentatif de la population française âgée de 18 ans et plus). Elle révèle que plus de neuf Français sur dix (92 %) se déclarent favorables à l’euthanasie lorsque le patient, atteint d’une maladie insupportable et incurable, en formule la demande.
Cette quasi-unanimité est partagée par les Français peu importe leur orientation politique, bien que les sympathisants de La France Insoumise, favorables à 87 %, se distinguent des sympathisants Renaissance, favorables à 98 %. Sur le recours au suicide assisté, c’est-à-dire l’autorisation pour les personnes souffrant de maladies incurables de s’administrer un produit létal sous la supervision d’un médecin, même constat. « 89 % des Français approuvent l’autorisation de cette pratique, dont 52 % ‘tout à fait’ », précise l’IFOP. Bref, sur le principe en tout cas, la « société » attend des réponses. Nul doute que lorsque l’on se retrouve personnellement confronté au « suicide » d’un proche, les certitudes n’en sont (certainement) plus.
Le projet de loi relatif à « l’accompagnement des malades et de la fin de vie », sera débattu à l’Assemblée nationale, en séance publique, à compter du 27 mai. Comprendre que cette nouvelle « mouture » qui divise – des voix se sont élevées pour la saluer et d’autres pour dénoncer une dérive permissive par rapport à l’ambition originelle – va encore largement évoluer au cours des prochains mois. Le débat, nécessaire, ne fait que commencer.
Soins palliatifs et maisons d’accompagnement
Le projet de loi comporte également tout un volet sur les soins palliatifs qui ont pour missions le soulagement de la douleur et des symptômes, l’écoute des souhaits du patient sur les modalités de prise en charge de la souffrance psychique ou sociale et l’accompagnement de la famille. De nombreux acteurs – notamment les professionnels de santé – jugent les ambitions en la matière trop « frileuses », au regard des besoins et enjeux alors que c’est ce volet qui devrait faire l’objet de toutes les attentions et ambitions. Les données ne sont pas reluisantes même s’il y a eu des progrès. La France se hisse au 15e rang des pays de l’OCDE (Organisation de coopération et de développement économiques), 1 patient sur 2 (et 1 enfant sur trois) n’y a pas accès. Et pour cause, il n’y a pas d’unités de soins palliatifs dans tous les départements. Les Vosges et la Meuse en sont dépourvues, par exemple.
D’où les « engagements » pris par le gouvernement pour créer des unités sur l’ensemble du territoire (soit 21), développer l’hospitalisation à domicile ainsi que des unités mobiles. Sans oublier les besoins en formation car « le sujet, c’est qui va assurer ces soins », pour reprendre les termes de Catherine Vautrin, la ministre de la Santé, lors de la commission spéciale de l’Assemblée nationale qui a évoqué la création de formations/diplômes en la matière, pour les médecins et d’autres professionnels de santé. Pour compléter ces dispositifs, le texte prévoit aussi la création de « maisons d’accompagnement » présentées comme des unités de vie intermédiaires entre le domicile et l’hôpital, pouvant assurer une prise en charge globale et pluridisciplinaire aux personnes en fin de vie ainsi qu’à leurs proches. Une enveloppe supplémentaire de 100 millions par an, sur 10 ans, soit 1 milliard, est annoncée par le gouvernement en sachant que les besoins en soins palliatifs vont aller crescendo, + 16 % sur la décennie à venir, selon la ministre (+ 23 % jusqu’à 2046, selon un rapport de la Cour des comptes, juillet 2023).
À noter encore que sur ce volet « soins d’accompagnement » (nouvelle notion qui englobe les soins palliatifs et au-delà tous les soins visant à « anticiper, prévenir et soulager les souffrances » à tous les stades de la maladie), les députés ont fait adopter un amendement (de Thibault Bazin, notamment) en faveur d’un « droit opposable » à bénéficier de soins palliatifs, contre l’avis du gouvernement. Cela signifie que les citoyens disposeront de voies de recours pour obtenir la mise en œuvre effective de leur droit et que les ambitions de l’État deviennent des « obligations de résultat ».