Mercy : une petite ville américaine où il ne se passe jamais rien et soudain une jeune fille est retrouvée assassinée sur la rive du fleuve. Un bon prétexte pour peindre les turbulences intimes d’une société qui privilégie les apparences.
Il y a ceux qui partent et ceux qui restent. Léo rêvait de l’Italie où sa mère était retournée après l’avoir abandonnée quand elle avait sept ans. Pour cela, elle travaillait dur à l’école et partout où elle pouvait gagner un peu d’argent. Ses parents ont connu une période de prospérité jusqu’à la crise des subprimes qui a laissé le père couvert de dettes et la famille dans un dénuement total. Léo voulait quitter cette misère et comprendre pourquoi sa mère avait soudain disparu. Le destin en a décidé autrement, un jour d’avril 2017.
Quatre personnages nous dévoilent les secrets d’une bourgade soi-disant épargnée par les drames. Lauren, la shérif lesbienne, 90 kgs, une droite qui ne tremble pas, est bien décidée à trouver le coupable. Le professeur trop proche de ses élèves, rapidement soupçonné d’être le meurtrier, la meilleure amie de la victime pétrie de culpabilité et le père dévasté de chagrin se succèdent pour distiller des indices, capter les facettes d’une jeune fille modèle. Les personnages satellite, particulièrement bien croqués, contribuent à éclairer ou embrouiller le lecteur. Avec ce second roman, Marie Vingtras confirme son talent à exprimer les ressentiments et les apitoiements d’une ville qui impose son emprise et dont seuls les silences garantissent la sérénité.
Que du vent
Ce n’est pas tout à fait un polar, mais ça y ressemble beaucoup. En quelques lignes, Yves Ravey peut installer un décor, des personnages et une ambiance dont on sait qu’elle va déboucher sur une menace.
Ici, on a trois maisons voisines, l’une occupée par Barnett, le narrateur, un ancien de l’Irak, en train de divorcer, pas très fort en affaire puisqu’il a déjà quelques liquidations à son actif. En face, se dresse la demeure de Miko dont l’épouse, l’aguichante Sally s’ennuie ostensiblement à bronzer chaque jour au bord de leur piscine et joue un drôle de jeu avec Barnett. Un peu à l’ouest vivent Samantha et Steve qui tiennent un chenil. Chacun épie son voisin. Tout le monde ment à tout le monde. La nuit, il se passe de drôles de choses. On est à la fois dans un roman social et dans un polar qui ne dit pas son nom. Yves Ravey excelle à nous laisser entre-deux, dans une zone indéfinie où l’on attend sans cesse une déflagration. Voilà un court roman parfaitement construit, qui scrute la part fourbe de l’humain. À conseiller à toutes les catégories de lecteurs.
Repères
Né en 1953 à Besançon, Yves Ravey est professeur d’arts plastiques et de français au Lycée Stendhal. Depuis 1989, il publie régulièrement romans et pièces de théâtre. Souvent qualifié d’héritier de Simenon, Il a reçu le prix Marcel-Aymé pour » Le drap » (Éditions de Minuit, 2002), rentré au répertoire de la comédie française et le prix Renfer en 2011 pour l’ensemble de son œuvre.
Née en 1972 à Rennes, Marie Vingtras, avocate à Paris, écrit sous pseudonyme. Son 1er roman « Blizzard » (L’Olivier, 2021) a été remarqué et « Les Âmes féroces » ont obtenu le prix du roman Fnac.