
Une vie de combat(s)
Tous ses mondes cohabitent. « Mes chansons ce n’est pas du Carlos, et mes livres ce n’est pas l’Almanach Vermot », sourit-il. Alors avec le collage il se permet « humour et dérision » : « J’ai envie que les gens rient, même si c’est d’un rire amer. » Il procède « par associations d’éléments contraires », après quoi, « je ne sais pas pourquoi, tout à coup il se crée une histoire ». Les histoires, c’est le fil de sa vie. Pierre Hanot est né à Metz, il y a grandi, avant dans les années 1970 de prendre la route pour vivre de la musique. Pour la faire vivre. « Je suis parti à l’aventure. » Il rencontre celle qui deviendra son épouse, ils s’installent à Courcelles-Chaussy. À sa disparition, il élit domicile à Boulay-sur-Moselle. Quelque chose comme un rebord du monde. De là, il fait rugir la machine. Travaille sur sa musique, ses textes, ses compositions. « On œuvre en groupe, il faut gérer les ego, les univers de chacun. » Se plonge « dans la solitude la plus extrême » pour l’écriture : « Si je pouvais le faire dans un caisson étanche, je le ferais. » Et s’adonne aux collages, « à mi-chemin entre les deux activités » précédentes, manière d’embrasser tous les spectres de l’art. Tout se complète. Il croit aux vertus de l’action. Cite la philosophe Cynthia Fleury, qui a phosphoré sur le sujet : « J’ai eu un parcours assez mouvementé. Par exemple, je n’ai jamais été adossé à une grosse maison de disques ou je n’ai jamais signé de best-sellers. Non, j’ai toujours été dans le combat, et il n’y a pas eu que des victoires. Pour lutter contre le ressentiment, Cynthia Fleury indique qu’il faut faire, qu’il faut agir. » Il se retrouve dans cette optique, cette façon de considérer le quotidien. Le geste artistique, dit-il, « c’est entrer dans un couloir et avoir devant soi tout un tas de portes à ouvrir ». Côté concerts, cela se traduira durant l’automne, c’est à parier, par un retour sur scène. Côté littérature, il continue d’accompagner Aux vagabonds l’immensité (La Manufacture des livres), paru l’an dernier, tout en espérant donner un destin au roman qu’il a bouclé. Le sujet : la Nuit des paras, à Metz, en juillet 1961, épisode de sinistre mémoire. Sa face sombre. Celle qu’il ne dissimule pas.
« Un travail d’artisan »
Pierre Hanot avance, enthousiaste. Et surtout étanche à toute nostalgie. « Je ne me retourne pas. Ou si je le fais, c’est seulement pour corriger les erreurs qui ont été commises. » Son boulot, « c’est un travail d’artisan », patient, minutieux. « Je suis un laborieux. Pour écrire un livre, j’ai besoin d’un an ou un an et demi, à raison de huit heures par jour, cinq jours sur sept. » Ça lui va comme ça. « Comment je me vois dans dix ans ? Je m’espère en bonne santé, mais ça ce n’est pas très original… Pour le reste… » La question ne lui convient pas, il l’écarte d’un revers de main amusé : « Je fonctionne jour après jour. » Et ça fait 50 ans que ça dure. « Faut que ça colle ! », l’exposition de Pierre Hanot, est visible du mercredi au samedi inclus, de 14 h à 19 h, à la Vitrine éphémère, à Metz, jusqu’au 30 octobre. Entrée libre.
Son bar
« J’ai tellement fréquenté les bars dans le passé que je ne les fréquente plus à présent. Je garde toutefois une nostalgie pour L’Abreuvoir, dans les années 1990, à Metz. Michel, le taulier, en avait fait un endroit formidable, très ouvert, d’une grande convivialité. »Son resto
« Aïe… Quand tu es en tournée, tu es tout le temps au resto. Alors quand je rentre chez moi, je me mets sur pause, je suis en ermitage. Je dois vous confesser que Metz, je ne connais plus très bien.»Son spot
« Mon lit ! (Sourire) Non, j’ai beaucoup d’affection pour le Jardin botanique. Un lieu qui me renvoie à l’enfance, d’une grande quiétude. »Ses vacances
«L’une de mes deux filles travaille à l’aéroport de Marignane, je lui ai rendu visite il y a une quinzaine de jours. Je citerais donc Marseille, une ville fascinante, contrastée, odorante, qui ne ressemble à aucune autre. C’est une ville de parole, et j’aime la parole. »