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Jumelage entre Nancy et Kanazawa : noces d’or gourmandes
Pour fêter les cinquante ans du jumelage de Nancy avec la ville japonaise de Kanazawa, une délégation a été invitée à passer la semaine dans la cité ducale. Élus, artistes, professionnels de santé, mais aussi chefs cuisiniers profitent de leur venue pour échanger avec les professionnels et les étudiants nancéiens. Nous les avons suivis leurs premiers pas sur le sol lorrain.
Patrick Fréchin et Koji Kawamura. Photo La SemainePour fêter les cinquante ans du jumelage de Nancy avec la ville japonaise de Kanazawa, une délégation a été invitée à passer la semaine dans la cité ducale. Élus, artistes, professionnels de santé, mais aussi chefs cuisiniers profitent de leur venue pour échanger avec les professionnels et les étudiants nancéiens. Nous les avons suivis leurs premiers pas sur le sol lorrain.
Koji Kawamura connaissait la cuisine de Patrick Fréchin uniquement sur internet. Un premier pont et un premier coup de cœur, concrétisé par une visite il y a trois ans du chef nancéien, à la tête aujourd’hui du restaurant Transparence, à Kanazawa, au Japon. Restait à rendre l’invitation et faire venir le chef japonais à Nancy. C’est chose faite avec la visite ce mardi 26 septembre de Koji Kawamura rue Stanislas. Mais le chef n’est pas seulement venu mettre les pieds sous la table, il a apporté avec lui ce grand sac avec de nombreux ingrédients : du miso, des épices, de la bonite séchée, des algues ou des sauces. La liste des produits frais avait été envoyée à l’avance pour que les courses soient prêtes. L’idée : cuisiner à quatre mains dans les labos de Transparence un plat traditionnel japonais, spécialité de la ville de Kanazawa. « La cuisine de Kanazawa est très particulière et surtout très traditionnelle, explique Koji Kawamura. La ville est proche de la mer, il y a donc beaucoup de plats à base de poissons et de fruits de mer. C’est aussi à flanc de montagne dans des terres très fertiles, avec donc beaucoup de légumes. Nous avons une quinzaine de sortes de légumes, de citrouilles rouges, du kinjiso, des choses qu’on ne trouve pas ailleurs au Japon. »
Rayonnement culturel par l’assiette
Pour Patrick Fréchin, cette visite prend un sens particulier, en tant qu’amateur de cuisine japonaise : « Je suis toujours curieux de découvrir de nouvelles saveurs, le lien que nous avions créé là-bas se prolonge avec la venue de Koji. J’ai hâte de découvrir sa recette. » Chef dans le plus vieux restaurant de Kanazawa et un des plus anciens du Japon, ouvert en 1752 par une famille au service des samouraïs locaux, Koji Kawamura s’apprête à cuisiner un plat de fête, une des signatures de son établissement : l’Ebisu-berobero, une recette à base à base d’œufs gélifiés servis dans un bouillon sucré salé accompagné de crevettes et de jaunes d’œuf.
Au restaurant Tsubajin, le plus vieil établissemnt de la ville fondé en 1752, e chef propose la cuisine traditionnelle de Kaga, la province du sud du Japon. Photo DR
Ambassadeur de la cuisine traditionnelle de Kanazawa, Koji Kawamura, 54 ans, fait partie de la délégation japonaise en visite toute la semaine à Nancy. En tant que chef cuisinier, il pense avoir toute sa place dans le rayonnement culturel de sa ville : « La cuisine japonaise à l’étranger se résume trop souvent à un petit nombre de plats, au premier rang desquels, les sushis. Oui, les sushis existent au Japon, mais les cuisines sont diverses et très typées, liées à des terroirs. » L’interprète aux côtés du chef japonais acquiesce : elle-même ne connaissait pas la cuisine de Kanazawa. En parallèle de son travail au restaurant, Koji Kawamura passe beaucoup de temps à voyager à l’étranger pour faire connaître la cuisine de Kanazawa, d’autant plus à l’aise dans cet exercice qu’il officie régulièrement à la télé ou la radio dans son pays.
À la découverte du gris de Toul
Genève, Paris, Strasbourg ou Bordeaux, il est venu plusieurs fois en France pour faire connaître la cuisine japonaise, classée au patrimoine mondial de l’Unesco en 2013. Mais le chef n’était pour autant jamais venu à Nancy, ville qui présente un point commun avec la sienne : un nombre très élevé de restaurants par rapport à son nombre d’habitants. « Les chefs sont quand même beaucoup moins connus qu’en France ! » sourit Koji Kawamura. Le chef japonais a prévu de rendre visite aux élèves du lycée Stanislas qui étudient la cuisine, où il échangera sur le thème de la gastronomie végane. Il poursuivra son voyage savoureux vers les domaines viticoles du Toulois. « La tradition du vin commence à s’installer sur les tables au Japon. On associe le vin rouge à Bordeaux, le vin blanc à la Bourgogne, j’ai hâte de découvrir le vin gris ! »
La parole à Antoine Le Solleuz
« Notre vision des jumelages est aujourd’hui plus ambitieuse »
Antoine Le Solleuz. Photo La Semaine
Tout le monde connaît les panneaux à l’entrée des communes qui vantent le jumelage avec telle ou telle ville d’Europe ou au-delà. Mais à quoi servent vraiment ces partenariats ? Réponse avec Antoine Le Solleuz, délégué aux relations internationales à la ville Nancy.
Quel était l’objectif de la création des jumelages ?
Les premiers jumelages sont nés après la seconde guerre mondiale avec un objectif : promouvoir la paix et l’amitié entre les pays d’Europe. Dans cette optique de réconciliation entre les peuples, les villes françaises signent essentiellement des partenariats avec des villes allemandes. L’Allemagne est, encore aujourd’hui, le pays qui compte le plus de villes jumelées avec des communes françaises. Dans les années soixante-dix, les choses ont évolué vers des coopérations autour du patrimoine, de la culture, du tourisme… Depuis quelques années, une image un peu poussiéreuse collait aux jumelages, parfois symboles d’entre soi, de programmes un peu vieillots ou limités à des voyages pour les écoles et les maisons de retraite. Cela ne se résumait pas à cela, j’ai d’ailleurs beaucoup d’estime pour mon prédécesseur à la mairie, mais quand j’ai été nommé adjoint à l’international ma mission était claire, il fallait dépoussiérer cette idée et repolitiser, au sens noble du terme, les jumelages pour les faire évoluer vers des coopérations basées sur les grands enjeux d’aujourd’hui et de demain dans le monde. C’est une vision plus ambitieuse.
Comment leur donner un nouveau souffle, concrètement ?
Aujourd’hui toutes les villes se posent plus ou moins les mêmes questions sur la transition écologique, la démocratie, la transition sociale… Discuter avec des villes qui sont en avance sur certains points, profiter de leur expérience et leur apporter notre expertise dans d’autres domaines, c’est une richesse. La ville de Nancy, qui a été labellisée Expert international en démocratie coopérative par le ministère des Affaires étrangères, est allée présenter le modèle nancéien à Karlsruhe, Saïda au Liban et Torreón au Mexique. Le dernier voyage à Cincinnati, sous la précédente mandature, avait pour objectif de voir le tramway et la piétonnisation du centre-ville. Aujourd’hui nous avons beaucoup d’échanges avec Ljubljana en Slovénie, qui est la référence mondiale pour la piétonnisation du centre-ville, pour voir comment ils ont accompagné les commerces, installés des parkings… Dans un monde qui est en transition, la meilleure réponse se fait à l’échelon des collectivités et des villes. On essaye au maximum de faire des échanges de bons procédés et des partenariats avec des villes sur des projets précis, avec des coopérations thématiques plus que par des jumelages. C’est comme cela que nous travaillons avec une ville d’un million d’habitants au Mexique, Torreón, sur la végétalisation. Un jardinier de Nancy est allé sur place étudier les essences résistantes à la chaleur et apporter son expertise sur la taille des arbres.
Quel budget est consacré aux jumelages ?
Ce n’est pas un gros budget – environ 100 000 euros par an – mais on essaye de l’alimenter par des financements extérieurs, en répondant à des appels à projets du ministre des Affaires étrangères, que nous remportons assez souvent d’ailleurs. Cela a été le cas pour nos derniers partenariats avec le Mexique ou le Liban, qui ont été cofinancés par les ministères des pays concernés. Le budget de la ville permet de soutenir, lui, les associations qui œuvrent pour l’International et des échanges d’étudiants. Chaque année des étudiants de l’école de Design, par exemple, partent six mois à Kanazawa, la ville ne prend bien évidemment pas tout en charge mais offre un coup de pouce qui leur permet de partir. Et depuis 30 ans, la ville accueille chaque été des stagiaires venant de toutes les villes jumelées et prend en charge leurs frais. C’est important, ils seront nos meilleurs ambassadeurs demain. Il y a aussi pas mal de petites actions d’échanges entre chefs étoilés, entre artistes et artisans d’art et une part du budget est consacrée à l’accueil protocolaire et diplomatique.
Comment les villes sont-elles choisies ?
Chaque ville a son mode de fonctionnement mais à Nancy c’est bien souvent des histoires humaines qui ont initié les jumelages. Pour Cincinnati, c’est un étudiant ingénieur parti y étudier qui a proposé de tisser des liens à son retour en 1991. Pour Kanazawa, c’est le sport qui a motivé le rapprochement : dans les années soixante-dix les Arts martiaux arrivaient en France et le jumelage est né de la volonté d’un Nancéien de les faire connaître, pratiquer en faisant venir des maîtres judokas. Aujourd’hui, Nancy a des liens particuliers avec dix villes dans le monde. Certains jumelages, comme celui avec Kanazawa, sont très actifs et d’autres plus en sommeil. Avant la guerre en Ukraine nous avions des échanges hyperdynamiques avec Krasnodar en Russie – nous avons même reçu l’ambassadeur de Russie deux mois – et nous avons depuis suspendu nos échanges. Le lien n’est cependant pas rompu, en attendant des jours meilleurs.
De nouveaux partenariats sont-ils en projet ?
En août dernier, nous avons signé un protocole d’accord avec Vinnytsya en Ukraine qui sera formalisé par un vrai jumelage en décembre prochain. C’est un acte fort – un contrat de mariage qui sera ratifié par les chefs d’État des deux pays ! – une volonté d’instaurer que l’Ukraine est quasi partie prenante de l’Europe, que ses habitants sont des frères et des amis. De plus Vinnytsya a un visage assez proche de celui de Nancy : c’est une ville universitaire, qui a des usines dans les matériaux, la métallurgie… on a des choses à se dire dans plein de domaines. Ce sera notre onzième jumelage. Et nous avons depuis longtemps la volonté de créer un partenariat avec une ville du Maroc, c’est une demande forte des associations marocaines. Nous avons des idées et cherchons une ville universitaire, hospitalière, bien engagée sur la transition écologique… Il faut qu’il y ait une logique, pas juste un logo de plus sur un panneau.